juin 2019

Équité salariale dans les organisations de juridiction fédérale

Le 13 décembre 2018, la Loi n°2 d’exécution du budget 2018, présentée par le gouvernement fédéral et qui édicte la Loi sur l’équité salariale, recevait la sanction royale. Lorsqu’elle entrera en vigueur, cette Loi s’appliquera aux employeurs des secteurs public et privé relevant de la compétence fédérale et comptant au moins 10 employés —à l’exception d’une personne morale figurant aux annexes IV ou V de la Loi sur la gestion des finances publiques (art. 3 (2))—. Les employeurs assujettis auront alors trois ans pour se conformer à cette Loi, dont l’objectif est de permettre aux employés occupant un emploi à prédominance féminine de recevoir « une rémunération égale pour l’exécution d’un travail de valeur égale » (art. 2).

Dès que les détails seront précisés, nous vous informerons de l’entrée en vigueur de la Loi et vous rappellerons les obligations qui en découlent ainsi que les délais pour les réaliser.

En attendant son entrée en vigueur, nous encourageons les organisations à agir de manière proactive, en instaurant des politiques et pratiques de rémunération équitables pour l’ensemble de leurs emplois. Au-delà des exigences légales, une politique de rémunération claire, structurée, équitable et exempte de biais sexiste contribue aussi à attirer et fidéliser les meilleurs talents.

Selon notre compréhension, voici les principaux éléments de la Loi sur l’équité salariale applicables aux organisations de juridiction fédérale.

Réalisation d’un plan d’équité salariale
Mise en place d’un comité d’équité salariale

Les organisations comptant au moins 100 employés, ou celles comptant moins de 100 employés, mais dont certains sont syndiqués, devront constituer un comité d’équité salariale, ou du moins mettre en œuvre tous les efforts raisonnables pour le faire.

Plan d’équité salariale

Avis

Le processus débute par l’affichage d’un avis à l’intention des employés. Cet avis doit notamment indiquer l’obligation de l’employeur à l’égard de la constitution d’un comité, ainsi que les règles relatives à sa composition le cas échéant, et informer les employés de leurs droits.

La Loi prévoit également la possibilité d’établir plus d’un plan d’équité salariale par organisation, sous réserve d’approbation par le Commissaire de l’équité salariale. Cette demande de programme distinct peut être faite par l’employeur, tout agent négociateur représentant des employés syndiqués ou tout employé non syndiqué (art. 30 (1)). Chacun des plans doit permettre d’identifier suffisamment de catégories d’emploi à prédominance masculine, sous peine de rejet de la demande par le Commissaire à l’équité salariale (art. 30 (5)).

Identification des catégories d’emploi

Les postes peuvent être regroupés au sein d’une même catégorie d’emploi s’ils répondent aux trois critères suivants (art. 32) :

  • Fonctions et responsabilités semblables
  • Qualifications semblables
  • Même régime de rémunération et même gamme de taux de salaire

Décision relative à la prédominance féminine et masculine des catégories d’emploi

Trois critères peuvent être analysés pour déterminer la prédominance d’une catégorie d’emploi (art. 36 et 37) :

  • Taux de représentativité des femmes ou des hommes au sein de la catégorie d’emploi (au moins 60 % des titulaires sont de même sexe)
  • Historique du taux de représentativité au sein de l’organisation
  • Stéréotype professionnel fondé sur le sexe

Il est également possible de regrouper plusieurs catégories d’emploi en une seule catégorie à prédominance féminine, si au moins 60 % des postes du groupe sont occupés par des femmes (art. 38 (1)).

Établissement de la valeur du travail

En vertu de l’article 41 (1), si des catégories d’emploi sont identifiées comme étant à prédominance féminine et masculine, leur valeur doit être établie au moyen d’une méthode contenant les quatre critères d’évaluation suivants (art. 42) :

  • Qualifications
  • Efforts
  • Responsabilités
  • Conditions de travail

Si les emplois ont déjà été évalués à l’aide d’une telle méthode, l’employeur ou le comité peut décider d’utiliser ces évaluations dans le cadre du plan d’équité salariale (art. 41 (2)).

Calcul de la rémunération

En plus du salaire, le calcul de la rémunération associée à chaque catégorie d’emploi, exprimé en dollars par heure, doit tenir compte des différentes formes de rémunération qui ne sont pas accessibles de manière égale à l’ensemble des catégories d’emploi visées par le plan (art. 3 (1), 44 (1) et 45).

Le législateur prévoit toutefois des écarts de rémunération autorisés ainsi que l’exclusion de certains écarts de rémunération (art. 46) :

  • Régime de rémunération fondé sur l’ancienneté
  • Maintien de la rémunération à la suite d’un reclassement ou une rétrogradation
  • Pénurie de main-d’œuvre qualifiée
  • Région où travaille un employé
  • Participation à un programme de perfectionnement ou de formation
  • Caractère temporaire, occasionnel ou saisonnier qui expliquerait l’absence de rémunération sous forme d’avantage social
  • Existence d’un régime de rémunération au mérite fondé sur un système formel et connu des employés d’évaluation du rendement
  • Rémunération pour des services supplémentaires

Comparaison de la rémunération

La Loi prévoit deux méthodes de comparaison de la rémunération des emplois à prédominance féminine et masculine (art. 48 (1)).

La première, dite « Méthode de la moyenne égale », compare la moyenne de la rémunération associée aux catégories d’emploi à prédominance féminine avec celle des catégories d’emploi à prédominance masculine à l’intérieur d’une bande déterminée par un intervalle de points (ou dans la bande la plus proche) (art. 49 (1)).

Dans le cadre de cette méthode, la rémunération d’une catégorie d’emploi à prédominance féminine est augmentée seulement si les deux conditions suivantes sont rencontrées :

  • La rémunération de cette catégorie d’emploi est inférieure à la moyenne de la rémunération des emplois à prédominance masculine dans la même bande ou dans la bande la plus proche;
  • La moyenne de la rémunération des catégories d’emploi à prédominance féminine dans une bande est inférieure à celle des catégories d’emploi masculines dans la même bande ou dans la bande la plus proche.

Lorsqu’elle est requise, l’augmentation de la rémunération d’une catégorie d’emploi à prédominance féminine doit permettre une égalité entre la moyenne de la rémunération des catégories d’emploi féminines et masculines au sein d’une même bande (ou des bandes les plus proches, le cas échéant).

Dans les exemples suivants, la rémunération de la catégorie d’emploi à prédominance féminine est augmentée uniquement dans l’exemple 2.

En effet, dans l’exemple 1, la moyenne de la rémunération des catégories d’emploi à prédominance féminine (14,85 $) est supérieure à la rémunération moyenne des comparateurs masculins (14,70 $). Il n’y a donc pas d’ajustement.

Dans l’exemple 2, la moyenne de la rémunération des catégories d’emploi à prédominance féminine (14,60 $) est inférieure à la moyenne des comparateurs masculins (14,90 $) et la rémunération de la catégorie féminine encerclée (14,20 $) est inférieure à la rémunération moyenne des comparateurs masculins. Cette catégorie bénéficierait donc d’une augmentation de 0,60 $/heure afin de permettre une égalité entre la moyenne de la rémunération des catégories d’emploi féminines et masculines au sein de cette bande.

La seconde méthode, dite « Méthode de la droite égale » prévoit comparer la droite de régression établie à l’égard des emplois à prédominance masculine avec celle des emplois à prédominance féminine (art. 50 (1)).

Selon cette méthode, la rémunération d’une catégorie d’emploi à prédominance féminine est augmentée seulement si les deux conditions suivantes sont rencontrées :

  • La droite de régression des catégories d’emploi à prédominance féminine se situe entièrement en-dessous de la droite de régression des catégories d’emploi à prédominance masculine;
  • La catégorie d’emploi se situe en-dessous de la droite de régression des catégories d’emploi à prédominance masculine.

Lorsqu’elle est requise, l’augmentation de la rémunération d’une ou de plusieurs catégories d’emploi à prédominance féminine doit permettre de faire coïncider les droites de régression des emplois à prédominance féminine et masculine.

Dans les exemples suivants, seul l’exemple 2 génère des ajustements pour certaines catégories d’emploi à prédominance féminine (voir les points encerclés).

En effet, dans l’exemple 1, bien que certaines catégories féminines se situent sous la droite de régression des catégories d’emploi à prédominance masculine, la droite des catégories féminines ne se situe pas entièrement en-dessous de celle des masculines. Il n’y a donc pas d’ajustement.

Dans l’exemple 2, seules les deux catégories encerclées bénéficient d’un ajustement puisque ces deux catégories se situent sous la droite de régression des catégories masculines et la droite des catégories féminines se situe entièrement sous la droite de régression des catégories d’emploi à prédominance masculine.

L’article 48 (2) prévoit que sous certaines conditions, d’autres méthodes peuvent être utilisées :

  • Un employeur peut faire une demande auprès du Commissaire à l’équité salariale afin d’appliquer une méthode prévue par règlement ou une méthode qu’il propose;
  • Un comité d’équité salariale peut décider d’appliquer une méthode prévue par règlement ou toute autre méthode qu’il considère appropriée.

Affichage

Les employés sont ensuite informés de la démarche par le biais de l’affichage d’une ébauche du plan d’équité salariale qui en détaille chaque étape (art. 52). L’ajustement de la rémunération auquel auraient droit certaines catégories d’emploi à prédominance féminine doit y être indiqué ainsi que la date à partir de laquelle ces ajustements sont effectifs. Des renseignements sur les droits et les recours des employés doivent également être indiqués (art. 51).

Les employés ont 60 jours pour fournir leurs commentaires à l’employeur (art. 54 (1)).

La version définitive du plan, tenant compte des commentaires reçus, le cas échéant, est ensuite affichée. Cet affichage doit avoir lieu au plus tard au troisième anniversaire de la date à laquelle l’employeur devient assujetti à cette loi (art. 55 (1)).

Révision du maintien de l’équité salariale

À chaque cinquième anniversaire du plan d’équité salariale, un affichage actualisé doit être effectué (art. 83 (1)).

De la même manière que pour la réalisation du plan initial, un avis doit être affiché par l’employeur (art. 80).

Le processus de mise à jour du plan est décrit de façon très sommaire et ne prévoit pas d’étapes aussi précises que dans le processus initial. En effet, l’article 78 (1) précise seulement que devra être identifié « tout écart de rémunération entre des catégories d’emploi à prédominance féminine et des catégories d’emploi à prédominance masculine résultant de changements (…) susceptibles d’avoir eu une incidence sur l’équité salariale depuis l’affichage le plus récent du plan d’équité salariale ».

Le plan d’équité salariale doit ensuite être actualisé en fonction des écarts de rémunération, si applicable, et les employés informés par le biais d’un affichage.

Déclaration annuelle

En vertu de l’article 89.1, tout employeur assujetti doit déposer sur une base annuelle une déclaration auprès du Commissaire à l’équité salariale. Celle-ci doit notamment inclure des renseignements sur la version la plus récente du plan d’équité salariale tels que la date, l’implication ou non d’un comité, le nombre de catégories d’emploi ayant droit à une augmentation ainsi que des renseignements sur le montant des ajustements requis.

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